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La Suisse a le choix entre la guillotine ou la Roumanie et la Bulgarie

Deux craintes majeures inquiètent le peuple suisse au début de cette année : la crainte de perdre son emploi à la suite d’une puissante invasion de Roumains et Bulgares, comme effet de la possible extension de la libre circulation et du marché de travail, aussi bien que la crainte de perdre le droit de disposer d’une manière si bénéfique des 7 accords conclus avec l’Union Européenne (la libre circulation des personnes, le marché public, le transport terrestre et aérien, la recherche, l’agriculture, les obstacles techniques du commerce). Le choix sera fait dans moins d’un mois et le résultat va décider le futur de la Confédération Helvétique. Le vote du 8 février représente pour la Suisse un point de carrefour dans ses relations avec l’Europe. Pour la Roumanie et la Bulgarie, les implications ne sont pas seulement de nature économique et politique, mais aussi par rapport à l’identité européenne, au nom de laquelle tous les membres de la présente Union doivent se réjouir de l’égalité des droits.

L’élection qui s’approche a dévoilé entièrement dès les premiers jours de l’année le mécanisme de campagne des partisans et des opposants de la libre circulation. La mobilisation est très puissante pour les deux parties, les réunions, les débats, les conférences, la publicité et les réactions des médias étant bien abondantes. Les coûts de la campagne se lèvent à des millions de francs. Les partis de la droite, ceux de la gauche et les cercles économiques militent pour l’ouverture vers l’Europe, pendant que le parti populaire UDC, L’Union Démocratique Fédérale (UDF), la Ligue de Ticino et l’organisation « Action pour une Suisse Indépendante et Neutre » (ASIN) ne voient dans cette extension qu’un moyen de croissance de la criminalité, du chômage de des abus de tout genre. Pour les derniers il n’y a aucune crainte au sujet de la clause « guillotine » que l’Union Européenne aurait le droit d’appliquer, le bien-être du pays n’étant dépendant ni de l’Europe, ni de la force de travail étrangère, mais de la protection de l’indépendance et de la neutralité. Les quatre grandes associations qui décident l’économie suisse et dont les représentants se sont réunis le 7 janvier à Berne – Economiesuisse, l’Union Patronale Suisse, l’Union Suisse des Arts et Métiers et l'Union Suisse des Paysans – accordent une importance capitale aux bonnes relations avec les 27 états membres de l’Union Européenne et ne considèrent pas alarmante pour la Suisse l’actuelle crise que les opposants utilisent pour semer de la panique parmi les électeurs. Conformément à la déclaration du président d’Econimiesuisse, Gerold Bührer, « Il n’y a pas une autre solution que dire OUI ». Le paradoxe de ce contexte est que l’ancien conseiller fédéral Christoph Blocher, le chef de l’UDC, milite pour un « NON » en tête d’une commission « de l’économie, des arts et des métiers », composée pratiquement de politiciens qui se déclarent en même temps entrepreneurs, selon l’affirmation de monsieur Pascal Gentinetta, le directeur d’Economiesuisse, faite pendant la dernière réunion.

 

 

Seulement des raisons économiques

Pendant que les opposants soulignent les risques majeurs au sujet de la perte du bien-être sur le plan collectif et individuel dans le cas d’un vote favorable, les cercles économiques et les différents secteurs publics attirent l’attention sur la manque de force de travail dans le Pays des Cantons, concernant spécialement l’agriculture, la santé (le personnel médical et les infirmières), le domaine informatique, les restaurants et les hôtels, aussi bien que les exports, les constructions et les banques. Les débats de la presse consacrent des pages entières à ce sujet, la conclusion générale étant que le besoin de force de travail et la crainte en ce qui concerne les étrangers représentent « une contradiction durable », selon les mentions du journal « Le Temps » du 5 janvier. Mais ce qui manque du débat politique, jusqu’au présent, est la chance légitime des pays comme la Roumanie et la Bulgarie de se réjouir des mêmes droits que ceux accordés à tous les pays membres de l’Union Européenne. Les discussions se mènent autour de la croissance économique, des besoins économiques de la Suisse, de la perte des avantages donnés par la bonne fonctionnalité des accords bilatéraux, et la carte qui se joue est, pour les deux parties, le bien-être du peuple suisse. L’assimilation des citoyens roumains et bulgares avec les monstrueux corbeaux noirs suggérée par l’affiche de campagne du parti UDC n’est pas du tout surprenante, la couleur noire étant attribuée évidemment par les populistes  suisses aux étrangères, pas pour la première fois (les moutons noirs n’ont pas encore été oubliés). Ce qui pourrait quand-même étonner est le manque d’attention presque générale concernant les aspects positifs, à part le pur intérêt économique que les deux peuples de l’Est de l’Europe pourraient avoir et duquel la Suisse, à côté de l’Europe, pourrait bénéficier: la richesse culturelle, la sensibilité artistique, de la créativité dans tous les domaines, le désir de s’ouvrir vers l’Occident et l’Humanisme. Si l’invasion des Roms chassée de l’Italie ou de l’Espagne est invoquée par les opposants de l’extension de la libre circulation, en fait les eurosceptiques, cela pourrait être le résultat d’une confusion au sujet des différentes ethnies européennes, que probablement une partie du peuple suisse n’a pas encore réussi à  élucider complètement.

 

La mobilisation des Roumains vivant en Suisse

À l’écart des Roumains vivant en Roumanie ou dans d’autres pays du monde, les premiers qui pourraient se sentir ciblés, affectés ou indignés sont justement les environ 4000 Roumains qui vivent en Suisse, presque tous ayant une qualification professionnelle supérieure. Il y a certaines organisations culturelles ou d’étudiants, des associations et des clubs qui représentent les communautés roumaines de plusieurs cantons. Comme une réaction déclenchée par l’actuelle campagne et par suite de l’initiative de Cosmin Paun, l’administrateur du site le plus connu des Roumains vivant en Suisse, www.casa-romanilor.ch, on se trouve en plein déroulement d’une campagne en ligne au but de soutenir l’extension de la libre circulation. Celle-ci est l’expression du désir de montrer que « nous existons, qu’il y a des Roumains en Suisse, des gens qui vivent et travaillent légalement, honnêtement, qui font part de la société suisse de la même manière que les Allemands, les Français ou des autres. Je me sens ennui par l’idée de discrimination entre un citoyen roumain et un citoyen hongrois ou allemand quand on parle de l’entrée en Suisse ou du changement du canton », nous a confessé Cosmin Paun, qui considère que la plupart des Roumains établis en Suisse s’est sentie offensée par la manière de laquelle on a assimilé, comme nation, un symbole  de la rapacité et de l’infraction. De plus, une lettre ouverte adressée à monsieur Hans-Rudolf Merz, le Président de la Confédération Helvétique, au Conseil Fédéral, aux habitants de la Suisse, à tous les partis politiques suisses et qui sera envoyée officiellement le 12 janvier, est disponible sur le site mentionné plus haut pour tous ceux qui désirent dénoncer la manière xénophobe de déroulement de la campagne suisse.

La mobilisation des Roumains se fait sentie dans la partie française de la Suisse, aussi bien que dans la partie allemande. Adrian Rachieru, le président de l’Association Interculturelle Roumanie-Suisse de Lausanne, considère que l’engagement des Roumains est nécessaire, même si dans la partie française les choses semblent évoluer d’une manière positive. L’identité roumaine mérite d’être connue, en éliminant ainsi une partie des craintes des ignorants et des indécis. L’extension de la libre circulation va actionner, dans son opinion, « contre le protectionnisme et la xénophobie ». 

 « Dans la partie allemande la situation devient plus mauvaise chaque jour et cela spécialement à cause des postes de radio et de télévision, qui y sont hostiles, par rapport à la presse », déclare Corneliu Sfintesco, le président du Club Helvétique-Roumain de Lucerne, en ajoutant : «Tous les Roumains d’ici voudraient faire quelque chose, mais pour faire cela, on doit être suisse aussi, sinon on ne nous prend pas au sérieux ». Selon l’opinion de celui-ci, le danger le plus grand ne se trouve pas à Genève, à Berne, à Zurich ou à Baden, mais dans la Suisse centrale, même si cette zone est étonnamment affectée le moins par le chômage.

Les réactions des médias, spécialement de la presse écrite, aussi bien que celles de l’espace public suisse contre la campagne menée par le parti UDC, comme l’opposant principal, montrent que ceux qui désirent l’extension de l’accord sont beaucoup plus nombreux que ceux qui s’y opposent, mais l’impacte de la campagne négative est plus puissant. La manière dont on va continuer la campagne et son dénouement n’apporteront peut-être rien de nouveau concernant la Roumanie et la Bulgarie, mais vont certainement achever les représentations suisses sur les frontières orientales de l’Europe, de l’Europe dans son ensemble, de la position que le peuple suisse désire avoir sur le continent et probablement des craintes qui l’inquiètent.

Simona Radulica Montserrat, Neuchâtel

Traduit par Mihaela Nistor, Birmenstorf AG